Initiation aux méthodes intégrées au jardin potager
Chapitre : Fertilisation
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⇒ Peut-on forcer un légume ?
Combien de fois entend-on parler du « forçage » des légumes et des fruits que les agriculteurs auraient l’habitude d’entreprendre pour augmenter leurs rendements au mépris de la qualité ! Ce forçage serait entrepris à l’aide d’un surdosage d’engrais industriels. Cette idée connue depuis longtemps est pourtant erronée. C’est plutôt le choix de la variété, le mode de culture et les conditions locales qui jouent sur la qualité. Pour citer un exemple, tous ceux qui ont l’habitude de cultiver en pleine terre des tomates, se sont rendu compte que la qualité gustative de celles-ci est largement supérieure à celles que l’on trouve dans les étalages des supers marchés. La plupart des tomates vendues dans les supermarchés sont cultivées hors sol et sont alimentées tous les jours par des solutions nutritives censées remplacer le travail complexe des microorganismes présents dans un sol vivant. La grande majorité des Français, surtout ceux qui vivent dans les grands centres urbains, sont formatés sans le savoir au goût insipide de ces tomates cultivées en serre qui ont envahi toutes les structures de distribution. Les variétés sont choisies pour répondre surtout à des objectifs de rentabilités et d’adaptation de culture hors sol sous serres pour résister aux maladies.
En ce qui concerne l’apport d’engrais, on a constaté que l’effet de l’azote est renforcé par le potassium et réciproquement ; c’est ce qu’on appelle le phénomène d'interaction positive au cours de laquelle les besoins en potassium sont d’autant plus grands que la fertilisation azotée est plus importante. Mais, il existe un plafond. La loi de Mitscherlich (loi des accroissements moins que proportionnels) précise que lorsqu’on apporte au sol des doses croissantes d’un élément fertilisant, les rendements évoluent selon une courbe dont le sommet représente le rendement maximum possible par rapport à des doses d’engrais. Au-delà de ce sommet, tout apport supplémentaire d’engrais ne sert à rien et devient un coût inutile pour l’agriculteur. À noter que dans l’interaction positive, l’effet exercé par deux éléments nutritifs est supérieur à celui exercé par la somme des effets exercés par ces éléments séparément. Par exemple, la satisfaction des besoins en potassium assure une plus grande efficacité des apports d’azote (1).
Le cas de l'azote.
On ne peut donc forcer une plante à absorber plus de sels minéraux qu’elle en a besoin, sauf pour l’azote qui est quand même absorbé bien qu’il existe un plafond de rentabilité. L’excès d’azote se remarque assez vite en raison des problèmes causés aux cultures. Si on apporte des éléments majeurs comme la potasse ou des phosphates au-delà des besoins, le surplus est laissé sur place. Par contre, le surplus d’azote absorbé par les plantes altère leur développement. On se retrouve avec un allongement de la période végétative des plantes retardant leur maturité se traduisant par différents problèmes comme une dégradation du feuillage ressemblant à des brûlures et l’apparition de maladies. Un feuillage sombre et abondant avec réduction des fleurs chez la tomate s’accompagnant d’une attaque de mildiou ou d’alternariose indique un possible excès d’azote. En général, toutes les plantes qui reçoivent un excès d’azote par rapport à leurs besoins deviennent très sensibles aux maladies cryptogamiques.
Une carence d’un élément important peut engendrer une perte de rendement même si les autres éléments sont suffisants. La loi d’interaction précise que le rendement d’une récolte est déterminé par l’élément qui se trouve en plus faible quantité par rapport aux besoins de la culture. Tout apport supplémentaire des autres éléments ne produira pas de gain de rendement. Ainsi, il est inutile de saturer une terre de jardin de potasse et de phosphate si par exemple l’azote est déficient. Les plantes potagères délaisseront tous les autres éléments tant que la carence en azote n’est pas également corrigée. Bien entendu, un facteur limitant est toujours difficile à déterminer sans analyse de laboratoire. Un ou plusieurs facteurs limitants ne sont pas rares dans les jardins potagers et ils se traduisent par des récoltes le plus souvent rachitiques accompagnées de maladies.
1) UNIFA ; Parlons de la fertilisation