Initiation aux méthodes intégrées au jardin potager
Chapitre : Biocontrôles
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⇒ Le choix variétal
La conservation des graines dans le but de les replanter expose l’agriculteur à des résultats qui peuvent être rapidement décevants, car la vitalité des graines n’est pas éternelle et les agriculteurs ne peuvent éviter des croisements avec d’autres variétés sauvages, voire une érosion génétique.
Beaucoup de graines récoltées ne durent pas au-delà d’une saison. Les graines de tomate perdent la moitié de leur viabilité au bout d'un an. Des agriculteurs ont constaté que le maïs doux perd environ un quart de sa viabilité chaque année (1). L'un des bienfaits de l'agriculture moderne est que les agriculteurs n’ont pas à stocker les semences comme le faisaient leurs ancêtres qui se retrouvaient souvent avec des variétés dégénérées. Nous pouvons commander des graines sélectionnées aux semenciers et les planter quand elles sont fraîches au mieux de leur viabilité.
Ce champignon se développement rapidement en présence d’un fort taux d’humidité ou suite à un arrosage effectué en fin de journée, ce qui augmente le temps de présence d’eau libre sur le feuillage. Il existe des variétés qui résistent davantage à cette maladie comme le Slice King Hybride F1. Il est conseillé d'effectuer des rotations avec des plantes non hôtes comme la laitue, le haricot, le chou.
La plupart des plantes issues de graines paysannes sont plus fréquemment atteintes par certaines maladies, mais quelques-unes sont aussi connues pour leur robustesse en raison de leurs caractères morphologiques particuliers (volume plus important du feuillage, croissance rapide, cuticule plus solide protégeant les tiges et les feuilles…).
La résistance génétique aux maladies n’a jamais permis de se soustraire aux pesticides en raison de sa trop faible durabilité face à l’évolution des bioagresseurs. C’est aussi pour cette raison que le nombre de plantes anciennes et robustes encore exploitables à tendance à s’amenuiser fragilisé par l’apparition de bioagresseurs plus destructeurs suite à des mutations génétiques ou provenant de contrées lointaines.
Contrairement à une idée reçue, les variétés modernes issues de la recherche des entreprises publiques ou privées sont souvent plus résistantes aux maladies et au stress hydrique, demandent moins d’intrants, sont plus productives et améliorent la qualité nutritionnelle.
Les techniques d’amélioration variétales également dénommées « biotechnologies vertes » ont beaucoup progressé ces dernières années. Les greffes et les hybrides ont fait l’objet de recherches afin de produire des plantes leur conférant des propriétés supérieures aux plantes d’origines.
Tomates et aubergines greffées ; hauteur des plants de tomates : 1,80 m
La technique de transfert de gènes a permis l'obtention en cultures céréalières d’une variété maintenant très connue, les triticales obtenus par croisement du blé et du seigle, largement cultivés aujourd’hui en agriculture biologique.
Les formes hybrides de tomates apparues ces dernières années et cultivées en plein champ se traduisent par une résistance importante à deux maladies récurrentes, le mildiou et l’alternariose. Ces progrès se soldent par une diminution importante des traitements fongiques tout en augmentant les rendements sans perte des qualités gustatives.
Les hybrides F1 sont issus de la première génération d’un croisement entre deux variétés génétiquement très différentes, mais compatibles. Les hybrides F1 sont quelquefois méprisées parce qu’elles se dégradent à la deuxième génération et parce que leur emploi débouche sur une dépendance du jardinier vis-à-vis du semencier. La commercialisation de toute nouvelle variété nécessite des années de recherche et un coût en investissement important qu’un agriculteur et encore moins un jardinier amateur ne peuvent se permettre de financer. Discriminer ces semences pour des prétextes idéologiques, c’est s’abstenir d’utiliser les avancés scientifiques qui ont un impact majeur sur la protection de l’environnement et la réduction des produits phytosanitaires.
Il paraît que pour préserver la biodiversité et ne pas dépendre des producteurs de semences, tout citoyen doit avoir la liberté d’acheter des semences non homologuées. C’est ce que revendiquent certaines associations et ONG se réclamant de la mouvance bio. Un paysan qui vend sur un marché des graines de tomates non homologuées sur un catalogue officiel est passible d’une amende de 250 €. La réglementation sur la vente des graines nous serait imposée pour protéger les intérêts des grands semenciers et il serait interdit de vendre des semences de variétés anciennes.
En réalité, n’importe qui peut vendre des semences anciennes ou faisant l’objet d’un brevet d’invention sous réserve d’être déclaré et si les caractéristiques de ces semences sont reconnues et vérifiables. Cette loi a été mise en place pour protéger aussi bien l’agriculteur, le particulier que les semenciers. Elle permet d’éviter qu’une variété soit vendue sous des noms différents ou qu’un même nom soit utilisé pour des variétés différentes sans que l'acheteur puisse vérifier l'authenticité des semences.
Il y a ceux qui prétendent que les graines paysannes seraient mieux adaptées au terroir et auraient plus de goût. Il y a plus de 40 ans, j’utilisais très souvent des variétés paysannes. Comme beaucoup de jardiniers, je les ai progressivement abandonnées pour plusieurs raisons :
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Les variétés anciennes connaissent souvent un manque de stabilité génétique. Pour un même nom de variété, il n’est pas rare de constater que les graines donnent des plants assez différents n’ayant pas la même qualité. Par exemple, pour la betterave rouge d'Egypte, d’une racine à une autre, la dimension des racines et la différence de qualité gustative sont souvent importantes ce qui est moins fréquent pour la variété améliorée.
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Certaines variétés ne sont plus cultivées en raison de leur faible rendement ou parce que leur qualité est inférieure aux nouvelles variétés. C’est par exemple le cas des graines de tous les haricots qui produisent des gousses dures et/ou pleines de fils même quand elles sont petites. C’est aussi le cas des concombres amers tombés en désuétude bien qu’ils soient connus pour leurs vertus médicinales.
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Comparée aux variétés homologuées, la résistance aux maladies des variétés paysannes comme la verticilliose est souvent en retrait avec perte de rendement. Cet inconvénient est peut-être supportable pour un jardinier amateur amoureux des variétés anciennes, mais ne l’est plus pour un maraîcher professionnel qui gère plusieurs hectares et doit livrer à ses clients des produits ayant des caractéristiques précises.
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Certaines variétés demandent des techniques culturales spécifiques coûteuses en matériels et temps de travail tels que les haricots à rame qui demandent beaucoup plus d’espace et l’emploi de nombreux supports de 2 m de long et de main-d’œuvre pour assembler ces supports. Les nouvelles variétés de haricots nains ont maintenant des taux de rendement comparables aux haricots à rame.
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La culture de certaines plantes potagères a été abandonnée parce que les consommateurs (et les jardiniers amateurs qui sont aussi des consommateurs) les délaissent pour d’autres légumes répondant à des choix culturels, de goût, de coût, ou parce qu’elles sont couramment sujettes à des maladies. C’est le cas de la fève de moins en moins cultivée en France étant souvent atteinte d’anthracnose, de pourriture grise (botrytis, encore dénommé la maladie de la tâche chocolat), et la rouille. La pourriture grise de la fève est plus fréquente en région méditerranéenne (2).
Les agriculteurs biologiques n'utilisent pas toujours des semences biologiques. S'ils ne trouvent pas suffisamment de semences certifiées biologiques pour leurs besoins, ils peuvent utiliser des graines issues de l’agriculture conventionnelle et continuer à étiqueter leurs récoltes comme biologiques. En outre une graine biologique ne veut pas dire que la plante mère n’a pas été traitée étant donné qu’en agriculture biologique des pesticides sont homologués pour protéger les graines contre certains bioagresseurs. Par exemple, il est pratiquement impossible d’éviter que des graines de haricots soient infectées par la bruche (larves du charançon du haricot ou Acanthoscelides obtectus qui creusent des galeries dans les graines de haricots) sans l’usage d’un pesticide (pyréthrine, huile de neem…) contre ce ravageur.
Verticilliose ; une maladie qui sévit sur les variétés anciennes.
Progressivement, les vaisseaux se bouchent produisant un arrêt de la circulation de la sève. La verticilliose est facile à reconnaître ; elle se caractérise par l’apparition sur le bord des folioles d’une tache en V jaune-marron. La maladie se propage de bas en haut. Progressivement les tissus se nécrosent et se dessèchent. L’extérieur des tiges ne présente pas de symptômes particuliers alors qu’une coupe longitudinale de celles-ci montre souvent une coloration brunâtre des vaisseaux. Cette maladie sévit surtout sur des variétés anciennes, notamment au printemps et à l’automne. Son évolution ralentie quand la température ambiante s’élève au-dessus de 30°, ce qui expliquerait la réversibilité de cette infection cryptogamique en été. Il n’existe aucune méthode de lutte permettant d’éradiquer la verticilliose en cours de culture. Les plantes atteintes par cette maladie doivent être arrachées.
Imaginons que quelqu’un vous propose sur un marché d’acheter des graines de tomate d’une ancienne variété dénommée « Saint-Pierre manosquine » (nom fictif créé pour l’exemple) produisant de gros fruits rouges comparables à la Saint-Pierre, mais plus productive. Qui peut vous assurer que cette variété ancienne a bien les propriétés annoncées par le vendeur au moment de l’achat ? Et si cette variété est connue dans la région, qui peut vous assurer que le vendeur ne vous présente pas des graines appartenant à une autre variété, ou que la Saint-Pierre manosquine qu’il reproduit depuis des années n’est pas atteinte par une érosion génétique ? Pour éviter que l’agriculteur et le particulier ne soient pas victime de ces arnaques, le législateur a prévu que les variétés anciennes devaient être également protégées. L’homologation donne ainsi des garanties aux acheteurs sur les propriétés annoncées des graines présentées par un vendeur régulièrement déclaré. Les semences homologuées ayant fait l’objet d’une déclaration sont regroupées dans plusieurs registres dont la liste est disponible sur le site web du GNIS (Groupement interprofessionnel des semences et plants) en cliquant ici.
Pour les producteurs de semences, des contrôles sous effectués sur place afin de vérifier "que la variété multipliée correspond bien à celle attendue et possède un niveau de pureté suffisant, que les espèces adventices et les organismes nuisibles aux semences sont absents ou dans la limite la plus faible possible" (3).
Il faut aussi que le vendeur soit déclaré afin que l’administration puisse vérifier de temps en temps ce qu’il produit et vend. À cet effet, les graines doivent être placées dans des emballages précisant l’espèce vendue sous sa dénomination botanique, le N° du lot, etc. afin que tout contrôleur puisse vérifier leur authenticité. Bien entendu, cette réglementation protège également le vendeur qui prétend détenir des variétés certifiées contre d’éventuels concurrents malhonnêtes qui refuseraient de se déclarer.
Pour qu’une recherche progresse, il faut la financer, et pour les agriculteurs qui recherchent de nouvelles variétés résistantes aux maladies, il faut un catalogue mis à jour tous les ans. La recherche en agronomie coûte très cher et elle est essentiellement assurée par des entreprises disposant d’un budget conséquent ou par l’INRA. Une partie des bénéfices des fournisseurs de semences est réinvestie dans la recherche pour produire des variétés plus compétitives, à meilleur rendement et de meilleure qualité. Les agriculteurs ont le droit de replanter une vingtaine de semences brevetées autoreproductibles (dénommées semences de ferme) sous réserve de payer un droit. Payer ce droit c’est rémunérer une recherche dont ils ont déjà bénéficié. Cette rémunération est comparable au droit d’auteur protégé par la SACEM. Utiliser des semences autoreproductibles protégées par un brevet est équivalent à la rémunération liée à la diffusion d’une œuvre artistique.
Mais pourquoi s’obstiner à revenir aux variétés anciennes ? En agriculture intégrée comme en agriculture biologique, pour réduire l’usage des pesticides, on cherche surtout à privilégier des plantes plus résistantes aux maladies. Par exemple beaucoup de variétés modernes de tomates, en particulier les hybrides F1 sont résistantes à la verticilliose. Les noms de tomates se terminant l’appellation VNF sont résistantes au Verticillium, aux Nématodes, à galles et au Fusarium (telles que la tomate F1 Pomona VFN des graines Baumaux, la tomate cœur de bœuf VFN F1). La courgette adrielle AF1 est connue pour ses qualités gustatives, son excellente productivité et sa bonne résistance aux maladies. Chez les cucurbitacées, des avancées spectaculaires ont été constatées contre les viroses et champignons phytopathogènes quand les hybrides ont été mis sur le marché.
Courgette diamant hybride F1
Vouloir revenir à des pratiques agricoles écologiques sans utiliser les dernières semences censées réduire les risques de maladie sous prétexte qu’elles feraient l’objet de brevets de protection exploités par des multinationales, relève de l’absurde. Certaines variétés modernes ont été créées par l’INRA qui n’est pas un établissement privé, comme la tomate « Pieraline » (résistante au mildiou et au Verticillium) issue de l’ancienne variété « Saint-Pierre » ou encore les tomates VFN « Piersol » « Marsol » et « Rossol ».
Encore quelques exemples de variétés potagères résistantes aux maladies.
- Courgette ronde de Nice : L’hybride F1 « Géode » (commande possible à cet endroit avec précision du vendeur le plus proche de votre domicile ; cliquez ici
- Courgette diamant hybride F1 – très productives et particulièrement résistante à l’oïdium sauf en fin de production.
- Concombre raider hybride F1 (très forte production).
- Toutes les tomates hybrides comme Supersteak hybride F1.
- Carotte Natacha hybride F1 résistante à l’oïdium et à l’alternariose.
- Carotte Maestro HF1 ; bonne résistance aux maladies
1) Global Farmer Network ; Une histoire de graines résilientes
2) https://www7.inra.fr/hyp3/pathogene/3botfab.htm
3) gnis ; inspection des cultures https://www.gnis.fr/service-officiel-controle-et-certification/inspection-des-cultures/